Le label Handycity® est attribué par Esenca, une asbl qui se définit entre autres comme le syndicat des personnes en situation de handicap et agit concrètement pour faire valoir les droits de ces dernières.
Le label est attribué (ou renouvelé) tous les 6 ans aux communes qui se portent candidates et remplissent un dossier. Le label reconnaît le travail accompli et encourage la démarche d’inclusion des personnes en situation de handicap sur leur territoire.
Parmi les critères d’attribution du label, on trouve la signature obligatoire de la charte communale de l’inclusion. Il faut savoir que certaines communes refusent déjà purement et simplement de la signer. Voici la liste des 32 communes qui refusent de signer la charte communale de l’inclusion.
La charte contient 5 engagements. Le 4ème engagement concerne l’accessibilité plurielle aux informations, transports, parkings et logements. En ce qui concerne les informations, le signataire de la charte prend l’engagement suivant :
« Nous nous engageons à respecter les législations en vigueur : la Directive européenne relative à l’accessibilité des sites internet et des applications mobiles des organismes du secteur public […] »
Cette directive est entrée en vigueur en juin 2020 pour tous les sites, et juin 2021 pour les applications. Elle rend obligatoire l’accessibilité numérique des sites du secteur public, qu’ils soient signataires de charte ou candidats au label Handycity® ou non. C’est une obligation générale. Cela signifie que, en 2024, tous les sites et apps des communes candidates au label se devaient de toute façon d’être conformes aux standards d’accessibilité. Rappelons qu’elles s’y étaient aussi engagées dans la charte, outre leur obligation légale. Cela donne donc 3 raisons d’être accessible: la loi, la charte signée et la candidature au label.
Nous avons voulu vérifier si c’était le cas pour les sites.
Méthodologie d’audit automatique de l’accessibilité des sites
Un audit d’accessibilité numérique doit combiner au minimum 2 méthodes : audit automatique avec des outils et audit manuel par un expert. C’est la seule façon de vérifier si les standards d’accessibilité ont été respectés. Idéalement, on complétera l’audit par un test utilisateur avec des personnes en situation de handicap, ce qui permet d’aller au-delà des standards et s’interroger aussi sur la véritable expérience utilisateur lors de la visite du site.
L’absence d’erreur détectée par un audit automatique ne signifie pas que le site soit accessible : un audit manuel doit compléter l’analyse. Par contre, plus le site contient d’erreurs détectées automatiquement, moins il a de chance d’offrir une expérience d’utilisation inclusive pour les citoyens en situation de handicap.
Nous avons donc procédé, le 10 octobre 2024, au test automatique de la page d’accueil des sites des 76 communes labellisées Handycity®.
Pour cela, nous avons utilisé un outil basé sur Axe-core, qui est le set de règles adoptées également par Google pour évaluer le pourcentage d’accessibilité des sites. Nous avons comptabilisé uniquement les stricts manquements aux standards d’accessibilité WCAG 2.1 AA, pas les bonnes pratiques ni les avertissements. Cela constitue un premier indicateur rapide de leur niveau d’accessibilité.
Avant d’entrer dans les détails, il faut noter que le nombre moyen d’erreurs d’accessibilité détectées, lors de ce test automatique, sur la page d’accueil de toutes communes confondues, est de 22… Le record d’erreurs sur l’unique page d’accueil est de 167… 3 communes ont plus de 100 erreurs. Seules 2 communes sur 76 n’ont aucune erreur détectée automatiquement. Plutôt alarmant comme premier constat…
Quels sites de communes se distinguent dans le test automatique ?
Voici, par ordre alphabétique, la commune de chaque province qui contient le moins d’erreurs :
Les communes suivantes comptent un nombre d’erreurs détectées automatiquement particulièrement bas (0 ou 1) toutes provinces confondues (classement alphabétique) :
Comme dit plus haut, un test automatique ne peut vérifier totalement la conformité d’une page aux standards d’accessibilité.
Un contrôle automatique couvre un maximum de 30 % des critères d’accessibilité à vérifier sur une page. Le reste relève d’une vérification manuelle.
De plus, la législation sur l’accessibilité impose de rédiger une déclaration d’accessibilité récente qui indiquera entre autres le niveau de conformité atteint et les contenus non conformes. La qualité de cette déclaration doit se vérifier manuellement.
Dans le cadre de ce panorama rapide, nous avons limité le contrôle manuel aux 2 communes qui avaient le meilleur score automatique : Tournai, Wavre.
Nous avons aussi limité la vérification manuelle aux 2 points suivants :
- Facilité de navigation au clavier pour les personnes en situation de handicap moteur des membres supérieurs
- Présence d’une déclaration d’accessibilité complète
Encore une fois, cette vérification manuelle est évidemment une infime partie de tout ce qu’un audit de l’accessibilité de page comporte habituellement.
Navigation au clavier
Une personne qui ne peut utiliser ses bras pour déplacer une souris d’ordinateur peut avoir recours à un contacteur (une sorte de gros bouton buzzer) pour cliquer sur les liens, les boutons, les champs de formulaires, etc. Si le site est accessible, le contacteur va en quelque sorte mettre en évidence les liens, boutons, champs et autres éléments cliquables les uns après les autres. Lorsque la personne veut cliquer sur un lien, elle actionne le contacteur au moment où ce lien est mis en évidence. Si le site n’est pas accessible, il est impossible de voir quel lien est mis en évidence, ou de cliquer dessus.
La navigation au clavier est impossible pour Tournai (le curseur se bloque dans le menu sans laisser cliquer sur le reste de la page). Elle est laborieuse pour Wavre (mise en évidence trop peu visible). Les 2 navigations sont donc non conformes aux standards d’accessibilité.
Déclarations d’accessibilité
Les 2 communes ont une déclaration d’accessibilité, mais aucune n’est complète. Celle de Wavre est ancienne et incomplète. La déclaration de Tournai ne cite pas l’inaccessibilité au clavier, qui est pourtant un obstacle de taille à l’accessibilité.
Conclusion de la vérification manuelle
Sans même étayer le contrôle automatique des autres vérifications manuelles indispensables, on voit déjà que les communes aux meilleurs scores automatiques ont tout de même un site inaccessible pour une personne voyante en situation de handicap des membres supérieurs.
Un contrôle manuel complet pourrait vérifier l’expérience de visite du site pour une personne malvoyante, aveugle, sourde et dans d’autres situations de handicap.
On peut conclure qu’aucune des 76 communes labellisées Handycity® n’a de site accessible contrairement à leur obligation légale.
Que peut-on faire ?
En tant qu’agence spécialisée en accessibilité numérique, nous allons prendre contact prioritairement avec les communes qui ont beaucoup d’erreurs, pour chercher à comprendre la source du problème : est-ce un manque de connaissances, est-ce lié à des limites de l’outil d’édition du site, une question de temps ou budget, etc. ?
Dans tous les cas, nous pouvons accompagner de manière pragmatique sur le chemin de la mise en conformité de ces sites à la législation en matière d’accessibilité numérique. Il peut s’agir par exemple d’audit, de formation, ou d’accompagnement à la montée en maturité de l’institution (ses outils, ses processus, ses ressources).
Nous allons aussi valoriser l’importance de l’accessibilité numérique auprès de l’asbl Esenca qui attribue le label Handycity®, afin que cet engagement soit mieux évalué.
Vous habitez Bruxelles ou en Wallonie ? Contactez votre commune pour connaître ses actions concrètes en faveur de l’inclusion des personnes en situation de handicap dans leur communication numérique ! L’accessibilité des sites des communes est une obligation légale depuis juin 2020. Votre voix citoyenne compte, alors faites-la entendre !
Les communes qui le désirent peuvent nous contacter à info@elevenways.be pour connaître leur score précis, la liste des erreurs en question et des pistes d’action.